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La saga des promesses 03/05/2010 19:28:42
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Le rêve de Jean Max
Extrait de l’Allocution du Premier ministre Jean-Max Bellerive le 18 fevrier 2010 : « Nous partageons un rêve : celui de voir Haïti comme un pays émergeant d’ici 2030, société de la simplicité, équitable, juste et solidaire, vivant en harmonie avec son environnement, sa culture et une modernité maîtrisée où l’Etat de droit, la liberté d’association et d’expression et l’aménagement du territoire sont établis, dotée d’une économie moderne, forte, dynamique, compétitive, ouverte et à large base territoriale, où l’ensemble des besoins de base de la population sont satisfaits et gérés par un Etat unitaire, fort, garant de l’intérêt général, fortement déconcentré et décentralisé »
Quel visionnaire ! Parle-t-il d’Haïti ou du Paradis ? |
Combien ça coûte ?
Cher, est la première réponse qui nous vient à l’esprit ! Le 31 mars dernier, les bailleurs de fonds ont engagés (ils ont promis d’engager serait plus juste) près de 5,3 milliard dans l'efforts de reconstruction d'Haïti pour les 18 prochains mois, et 9,9 milliards de dollars sur les 10 prochaines années. Obama pour sa part estime qu'Haïti aura besoin de 11,5 milliards de dollars pour les 18 prochains mois, et 34,4 milliards de dollars au cours des dix prochaines années pour tout reconstruire. Expert en rêve américain il doit savoir de quoi il parle...
Paroles que tu sèmes au vent...
Comme le chantait Dalida « Paroles, paroles, paroles, paroles, paroles et encore des paroles que tu sèmes au vent », elle était visionnaire même si le sujet était différent.
Petit voyage dans le temps: en 1970, l'Assemblée générale de l'ONU a promis de consacrer 0,7% du Revenu National Brut (RNB) à l'aide au développement.
22 ans plus tard, en 2002, les pays riches ont confirmé cette promesse par le Consensus de Monterrey sur le financement du développement.
En 2005 lors du sommet du G8 de Gleaneagles les pays riches ont réitéré cette promesse et se sont de nouveau engagés à atteindre l'objectif de 0,7% en 2015.
40 ans plus tard (le temps passe) Max Lawson, porte-parole d'Oxfam déclare « Il est scandaleux que plus de la moitié des pays riches aient réduit leur aide en 2009 » celle-ci ne représentant plus que 0.31% du Revenu National Brut (RNB). «C'est l'heure de vérité: l'aide doit absolument augmenter» (nous sommes d’accord avec lui) «la crédibilité des dirigeants internationaux est en jeu» (De quelle crédibilité parle-t-il ?) et de poursuivre « Lors du sommet des Nations unies qui se tiendra en septembre 2010, les pays riches devront absolument s'engager à suivre un échéancier strict, couplé à des obligations légales nationales, afin d'atteindre les 0,7% ».
Est-ce une bonne résolution pour la nouvelle année? Comment croire que 40 ans de promesses qui n’ont permis d’atteindre que 0.31% du RNB, que ce pourcentage va doubler dans les 5 prochaines années? Comment croire un seul instant que les pays donateurs (qui sont aussi les décideurs et payeurs) accepteront que leur «générosité» soit contrainte à un échéancier et sujet a des obligations légales et nationales, alors qu’ils ont refusé le 31 mars d’engager leurs promesses sur un échéancier?
La communauté internationale frappée d’alzheimer
Déclaration faite à l’ONU le 31 mars dernier « la conférence, co-organisée par les États-Unis et l'ONU, a obtenu des engagements de sommes importantes auprès des donateurs [...] presque tous les pays ont dépassé leurs obligations».
De quelles obligations et de quels engagements s’agit-ils ? Ce ne sont que des promesses financières pour aider Haïti rien de plus. Quelques exemples pour confirmer qu’il ne s’agit que de promesses:
«La dernière fois que l'Amérique Centrale a été frappée par une catastrophe naturelle de cette envergure, l'ouragan Mitch en 1998, moins d'un tiers des milliards de dollars promis ont finalement été versés.
Suite aux ouragans Fay et Gustav et la tempête tropicale Hanna qui ont balayé le territoire haïtien à la fin de l'été 2008 et qui ont fait reculer l’économie haïtienne de 15 %, une conférence des donateurs à Washington avait promis 324 millions de dollars. Cinq mois après, presque rien n’avait été versé. Le Canada, les Etats-Unis, la France, l'Union européenne, etc.. avaient promis une aide d'urgence de plus de 100 millions de dollars. Un an plus tard, Haïti avait reçu 5% de ce montant.
Des sommes énormes ont été solennellement promis lors des conférences des donateurs en 2004 et 2009. Seulement 30% des engagements avaient été décaissés près d'un an plus tard.
Le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA) déclare le 9 avril 2010 que l'appel de fonds d'urgence pour Haïti (révisé a la hausse à 1.4 milliard en février) continuait de stagner à environ 50%, «Il manque toujours 751 millions de dollars pour Haïti» précise Elisabeth Byrs porte-parole du Bureau de coordination des Affaires humanitaires de l'ONU (OCHA) à Genève. (Ici nous ne parlons que de fonds d’urgence pas de ceux prévus pour la reconstruction, il y a de quoi se poser des questions sur les sommes promises).
L’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE) se montre pessimiste pour l’Afrique qui ne devrait recevoir que 11 des 25 milliards de dollars supplémentaires promis lors du sommet du G8 de Gleneagles en 2005, ceci en raison des promesses non tenues de certains bailleurs européens (Rappelons que ce sont ces mêmes bailleurs Européens qui ont fait des promesses de plus 1,6 milliards d’aide pour Haïti...)
Le gouvernement Haïtien comme bouc émissaire
Malgré toutes «les bonnes intentions» des bailleurs de fonds lors de la conférence du 31 mars, l'histoire récente de l'aide à Haïti soulève, au dire des bailleurs, de sérieuses questions quant à savoir si les millions de dollars se traduiront par des améliorations significatives dans la vie de la plupart des Haïtiens. Plusieurs responsables gouvernementaux des bailleurs de fonds ont cités comme refus à une aide directe: l’incapacité du gouvernement Haïtien à gérer dans la transparence les fonds qui lui seraient confié et la corruption. Ces raisons ne doivent toutefois pas occulter les véritables raisons.
Contrairement à ce que l’on veut laisser entendre, ces fonds manquants n'ont pas disparu dans les profondeurs d'un gouvernement haïtien corrompu, ces fonds n’ont pas disparu tout simplement parce qu’ils n’ont jamais existé quand les partenaires internationaux ont omis de donner suite à leurs promesses. Le 31 mars dernier, l’envoyé spécial Bill Clinton a publiquement reconnu sa propre incapacité à collecter l'argent promis dans le passé. On peut se demander comment Obama a pu confier à l’ex président Clinton le rôle de collecteur de fonds pour Haïti ? Il faut espérer que Bill Clinton se montrera plus compétent dans le rôle de gestionnaire de la Commission Intérimaire de Reconstruction d'Haïti (CIRH) qu’il co-présidera avec le premier ministre Jean Marx Bellerive.
il semble que ces raisons invoquées aient pour seul but de maintenir une pratique courante qui consiste à court-circuiter les institutions haïtiennes et à créer ou favoriser des structures privées et des ONG, en détournant les ressources humaines et financières au détriment du secteur public. Rappelons pour mémoire que 80% de l’aide internationale transitait, avant le séisme, par les ONG. À l’évidence, les raisons invoquées ne sont pas pertinentes, certes notre gouvernement haïtien n’est pas parfaitement transparent ni exempt de corruption (mais quel gouvernement peut nier ne pas avoir de zone d’ombre ni des pots de vin sur la conscience?) Comment le gouvernement Haïtien peut-il s’assurer qu’une partie des fonds ne disparait pas dans l’octrois des contrats à des structures privées ou dans les ONG puisqu’il n’en a pas le contrôle?
SMS aux pays donateurs
Chers pays donateurs, on est en droit de se demander à quoi servent tout vos engagements puisqu’année après année, nous ne faisons que constater que cela n’est pas suivi d’effets et que vos promesses ne valent rien et n’engagent personne. Il ne suffit pas de se réunir et de promettre. Il faut savoir tenir ses promesses.
HL.
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