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Haïti - Tourisme : Allocution de Fritz Deshommes sur le patrimoine, le tourisme et le développement durable
13/11/2011 09:52:41

Haïti - Tourisme : Allocution de Fritz Deshommes sur le patrimoine, le tourisme et le développement durable
Le colloque international « Patrimoine, tourisme culturel et développement durable en Haïti, enjeux et perspectives d'avenir », qui s’est ouvert le 10 novembre et qui s’achève ce dimanche 13, à mobilisé plus de 50 conférenciers issus de 10 pays et rassemblé les partenaires culturels et les experts haïtiens pour la sauvegarde du patrimoine, de nombreuses organisations de la société civile haïtienne, quantité de jeunes, artistes étudiantes et étudiants, tous défenseurs de la force de la culture et d'un patrimoine riche et unique pour le relèvement du pays.

Lors de ce colloque, réalisé en collaboration avec l’Université Laval [Québec, Canada] en partenariat avec la Chambre de Commerce et d’Industrie d’Haïti et l’Association Touristique d’Haïti, Fritz Deshommes, vice Recteur à la recherche à l'Université d'État d'Haïti (UEH), dans son allocution a abordé les notions de patrimoine, de tourisme culturel et de développement durable, dans leur définition, leur sens véritable, leur portée, leurs implications, mais aussi leurs imbrications et leurs interrelations.

«... Pour nous en Haïti, qu’évoque la notion de patrimoine ? Comment mettre le tourisme au diapason de la valorisation de notre patrimoine ? Quel rapport avec le développement durable ?

Étymologiquement, la notion de patrimoine réfère à l’ensemble des biens hérités du père, des parents, de la famille par extension. Le patrimoine fait donc appel à l’idée d’un héritage légué par les générations qui nous ont précédées et que nous devons transmettre au moins intact, ou mieux enrichi, aux générations futures. Il relève du bien public, du bien commun. Ainsi, pour le bien des héritiers, faut-il protéger l’héritage, le valoriser, le faire fructifier.

Nous oublions souvent que nous sommes les héritiers de l’une des trois plus grandes révolutions mondiales. La plus importante, la plus complète, celle qui a le plus marqué l’histoire universelle, la première et la seule révolution anti-esclavagiste triomphante, la seule à reconnaitre une égale humanité à tous les hommes.

Le patrimoine légué en Haïti, c’est ce sens de l’autodétermination des peuples, cette idée de liberté, de l’égalité entre tous les hommes...

Le patrimoine légué à cette occasion, c’est ce sens de l’autodétermination des peuples, cette idée de liberté, de l’égalité entre tous les hommes, que nos pères ont portée, tant par les principes que par l’action dans tous les coins et recoins de nos 27,750 km2 et même au-delà, et dont témoignent encore, de manière éloquente, des fortifications, des palais royaux, des sites et lieux de combat, et toute la mémoire de ces batailles héroïques et de ces noms évocateurs, comme la Crête à Pierrot, la Ravine à Couleuvre, Vertières, etc...

Le patrimoine légué, c’est aussi ce sens de la solidarité et la fraternité humaine, cet internationalisme, avant la lettre, qui nous ont conduit, à travers tout le continent, des États-Unis d’Amérique au Brésil, du Venezuela à l’Équateur, de la République Dominicaine à la Colombie, et plus loin encore en Grèce, et plus tard jusqu’en Libye et jusque sur le continent africain.

Le patrimoine, c’est aussi cette langue nationale, le Créole, forgée dans la nécessité, dans le besoin, dans la résistance, dans le refus de la servitude, dans la quête d’identité et qui constitue aujourd’hui le ciment qui unit tous les Haïtiens, comme le reconnaît notre Charte Fondamentale.

Le patrimoine, c’est notre manière particulière d’approcher le sacré, notre vision spécifique du cosmos, notre rapport à Dieu, notre manière particulière de vénérer nos morts.

Ce sont nos contes chargés de leçons ; nos chants, nos danses, notre musique, notre peinture, qui témoignent de notre vitalité en tant que peuple, qui disent, à la face du monde, notre philosophie de la vie, notre conception du monde qui veut que « celui qui porte atteinte au bonheur de l’autre porte atteinte à son propre bonheur ». Ou encore « l’intégrité de chacun dépend de celui de l’autre ».

Mais, c’est aussi tous ces savoirs, tous ces savoir-faire, toutes ces connaissances éprouvées et mises en œuvre chaque jour dans le domaine de la médecine, dans le domaine de l’agriculture, dans le domaine de la construction, et qui ne demandent qu’à être identifiés, systématisés, valorisés et enrichis.

C’est aussi toute cette tradition juridique particulière de notre droit informel, qui règle les relations entre les membres de la communauté, loin du droit officiel, loin du droit importé, ce droit coutumier qui, déjà, bien avant la Convention Internationale des Droits de l’Enfant, avait reconnu, dans les faits, que « tout timoun se timoun ».
Le patrimoine, c’est aussi nos grottes, nos cours d’eau, nos sources, nos chutes d’eau, nos forêts, nos parcs naturels, notre extraordinaire biodiversité, faune et flore, aquatique et terrestre. Notre patrimoine, c’est aussi tout cela et plus encore.

Aujourd’hui en 2011, n’est-il pas loisible de nous demander : qu’en avons-nous fait ?

- Qu’avons-nous fait de ce patrimoine riche, précieux, immense ?
- Qu’avons-nous fait de ce pays promoteur de toutes les libertés, artisan de multiples libérations, champion toutes catégories du droit à l’autodétermination ?
- Qu’avons-nous fait de ces témoins de notre plus grand héritage, que sont nos fortifications, nos palais, ces sites de batailles historiques ?
- Connaissons-nous la maison de Toussaint à Ennery, la maison de Dessalines à Marchand ?
- Quel est le sort que nous faisons à notre langue nationale ? Nos chants, nos danses, nos contes, notre musique sacrée et profane, comment les traitons-nous ?
- Ne nous arrive-t-il même pas d’avoir honte d’une bonne partie de ce patrimoine ?

Il arrive trop souvent que ce patrimoine soit méprisé, délaissé, voire combattu par les élites, notamment le patrimoine culturel : médecine traditionnelle, vaudou, musique racine, Créole, etc... Mais, en outre, cette élite tend à rendre, unilatéralement responsables de la destruction du patrimoine matériel historique, les couches pauvres de la population, en oubliant qu’elles ont été maintenues dans l’ignorance, la misère et la crasse. En oubliant aussi que ce sont les couches populaires, les principales gardiennes d’une bonne partie du patrimoine immatériel.

A l’occasion de ce colloque sur le patrimoine, il est essentiel de nous poser toutes ces questions. Et la plus brûlante d’entre toutes : sommes-nous de bons héritiers ?

Il est heureux que ce colloque porte également sur le tourisme et sur le développement durable. Mieux encore : que le tourisme soit lié au patrimoine. Cela pourrait contribuer, puissamment, à améliorer notre approche de ce facteur de rapprochement des peuples.

Traditionnellement, quand nous évoquons le tourisme et quand nous parlons de politique touristique, nous voyons surtout la construction des routes qui mènent aux plages, la folklorisation de certains aspects de notre culture et de notre patrimoine, la construction d’hôtels, etc...

Nous pensons essentiellement à un ensemble d’investissements : non pas parce qu’il faut améliorer le cadre de vie général de la population, non pas pour que la population valorise sa culture, ses pratiques positives, ses savoirs, ses savoir-faire, mais parce qu’on veut attirer à tout prix des visiteurs.

Même si, par ailleurs, les rues sont sales et que les troupes étrangères et leurs chars de guerre y maintiennent une ambiance d’anomalie, propre à faire fuir tout visiteur en quête d’un environnement serein, source potentielle d’enrichissement intellectuel et culturel !

Dans cette perspective, la liaison patrimoine-tourisme, dans le cadre de ce colloque, est prometteuse, car elle nous montrera la voie la plus sûre et la plus durable pour promouvoir un développement touristique authentique et non artificiel.

C’est quand le pays sera rendu attrayant, les inégalités atténuées, l’héritage valorisé, que des visiteurs seront véritablement attirés par ce cadre riche de culture, d’histoire et de beauté.

Autrement dit, le développement durable exige de partir de ce qu’on a, de le moderniser, de l’enrichir, de puiser dans le patrimoine universel, sans rejeter ce qui nous est propre.

Le patrimoine doit d’abord être mis au service des héritiers, servir à la connaissance de nous-mêmes, de nos racines, de notre histoire (la vraie), à la connaissance aussi de notre propre pays. Un pays si étudié par les autres !

Cette connaissance, d’un legs aussi important, peut contribuer à nous rapprocher dans un désir de vivre ensemble, de progresser ensemble, de chercher notre mieux-être collectivement. Car, développer le tourisme ne saurait commencer par les routes proches de la plage et les hôtels. Construire un cadre de vie agréable pour soi, retrouver sa dignité de peuple, sont des conditions indispensables pour un patrimoine protégé, valorisé, dont la richesse naturelle, culturelle, historique et artistique sera partagée avec d’autres, les touristes de demain. Nous voilà donc partis pour un excellent colloque qui, de manière significative, intervient deux semaines après la tenue d’un autre sur notre langue nationale, le Créole.

Comme pour dire le ferme engagement de l’Ueh à la promotion de tous nos facteurs d’intégration nationale !
A ce sujet, il n’est pas sans intérêt de se rappeler ce mot de l’Oncle, le Dr. Jean Price Mars, qui disait : « C’est grâce au Créole que nos traditions orales existent, se perpétuent et se transforment, et c’est par son intermédiaire que nous pouvons espérer combler le fossé qui fait, de nous et du peuple, deux entités apparemment distinctes et souvent antagonistes ».

Nous pourrions en dire de même pour la plupart des autres aspects du patrimoine déjà mentionnés.
Aux porteurs principaux du colloque, les professeurs Wilson Laleau et Laurier Turgeon, le ministre Laleau qui, jusqu’à récemment encore, était notre Vice-recteur aux Affaires Académiques, à la direction et au personnel du Programme de Maitrise en « Histoire, Mémoire et Patrimoine » de l’Ueh, à tous ceux qui ont été impliqués dans la préparation de cette importante manifestation scientifique, nous présentons nos plus vives félicitations.
Nous nous réjouissons de notre collaboration avec l’Université Laval qui se prévaut maintenant d’une histoire déjà trentenaire et qui, au fil du temps, s’amplifie, s’étend et se prolonge avec bonheur.

Nous nous réjouissons également du partenariat avec la Chambre de Commerce et d’Industrie d’Haïti et l’Association Touristique d’Haïti en espérant qu’ils soient durables.

Toute notre gratitude à nos intervenants, aux modérateurs et présidents de séance, à nos collègues de l’Université Laval et à tous les participants. Au nom du Conseil Exécutif de l’Ueh, je déclare ouverts les travaux du colloque « Patrimoine, Tourisme Culturel et Développement Durable ».


Lire aussi :
https://www.haitilibre.com/article-4223-haiti-tourisme-vibrant-plaidoyer-de-michaelle-jean.html
https://www.haitilibre.com/article-4211-haiti-tourisme-tour-d-horizon-sur-le-developpement-touristique-en-haiti.html
https://www.haitilibre.com/article-4194-haiti-tourisme-colloque-international-sur-le-tourisme-et-le-patrimoine.html

HL/ HaïtiLibre

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Dave
Posté le 13/11/2011 14:39:01
Quel beau plaidoyer du vice recteur concernant les différents aspects de notre patrimoine. C'est un plaidoyer riche de sens livré avec coeur et générosité...
 




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