iciHaïti - Football : Hommage à Étoile d'Haïti Melchie Daelle Dumornay alias «Corventina»

iciHaïti - Championnat Spécial D1 : Classement des 3 Groupes avant le premier match de la 10ème et dernière journée

iciHaïti - USA : La PNH a reçu un lot de matériels et d’équipements pour lutter contre les Gangs

iciHaïti - Championnat Spécial D1 : 10ème et dernière journée (Calendrier)

iciHaïti - Football : Séminaire FIFA / CONCACAF sur la licence des clubs de D1


+ de nouvelles


Haïti - Actualité : Zapping…

Haïti - Football : Toronto FC acquiert l'international haïtien Derrick Étienne Jr.

Haïti - Textile : Taïwan soutien le Centre de Formation en Technologie de Vêtement

Haïti - Espagne : Accord cadre avec l'Université de Cordoue (Córdoba)

Haïti - FLASH : «Barbecue» envoie un avertissement aux membres du CPT


+ de nouvelles



Haïti - Politique : Intervention de la Ministre déléguée Rose Anne Auguste, aux Nations Unies
06/05/2014 12:49:01

Haïti - Politique : Intervention de la Ministre déléguée Rose Anne Auguste, aux Nations Unies
Lundi, dans le cadre de la 68e Assemblée Générale des Nations-Unies [5 et 6 mai], Marie Carmelle Rose Anne Auguste la Ministre Déléguée auprès du Premier Ministre Chargée des Droits Humains et de la Lutte contre la Pauvreté Extrême a prononcé, un vibrant discours au siège des Nations Unies à New York, dans le cadre du débat thématique spécial sur la « Culture et le développement durable dans l’agenda de développement pour l’après 2015. »

Intervention de la Ministre Auguste :
« Je remercie le Président de l’assemblée d'avoir invité le gouvernement d'Haïti à participer à ce débat sur l’importance de la culture comme vecteur du développement durable. Le gouvernement haïtien considère comme un réel privilège le fait de pouvoir apporter sa contribution à la recherche de solution pour l’adoption généralisée d’un modèle de développement durable.

Devant les résultats mitigés des tentatives réalisées jusqu’ici pour ce faire, il s’est révélé que l’absence de la dimension culturelle dans ces tentatives en était l’une des principales causes. La culture s’avère être en effet un élément sine qua non de tout processus de développement.

Elle est fondamentale.

On conviendra que le développement est un processus collectif. Vouloir développer une société divisée, secouée par de fortes tensions sociales, sans tenir compte et sans se servir de son profil culturel et linguistique, est un exercice futile, un gaspillage voué à l’échec. Voilà pourquoi tout projet de développement doit d’abord être un projet culturel et social. La culture est donc non seulement le catalyseur et le moteur du développement durable, mais elle en est surtout un passage obligé.

C’est par la culture et la langue que les gens se découvrent des affinités, une identité commune, des rêves communs. C’est de leur culture que les sociétés puisent l’énergie de lutter ensemble pour vaincre leurs différends, réaliser la cohésion sociale indispensable à la concrétisation de ces rêves communs. La culture c’est l’âme d’un peuple, son souffle de vie, et la langue c’est l’outil fondamental pour l’expression de cette culture. A son dernier souffle, on dit de l’homme qu’il a rendu l’esprit. Il est mort. C’est tout aussi vrai pour un peuple privé de sa culture ou un peuple dont la langue est jugulée. C’est un peuple mort. Un peuple mort ne peut pas se développer, quel que soit le montant d’aide qu’on peut lui accorder. Aussi, loin des pratiques consistant à réduire la culture aux loisirs, donc à la considérer comme accessoire, à la reléguer au second plan, un gouvernement ne saurait jamais accorder trop d’importance aux dimensions culturelles et linguistiques d’un peuple. Le budget consacré à leur promotion et à leur développement ne saurait jamais être trop important, car la culture et la langue conditionnent ce que toutes les sociétés s’entendent pour considérer comme primordial et sacré : le développement économique.

Dans un processus de développement durable, la culture remplit trois rôles essentiels.

  • Elle permet d’abord au peuple de se retrouver, de se définir et de se projeter dans l’avenir, c’est-à-dire bâtir ce qu’on appelle un projet de société ;
  • Elle a également un rôle que je dirais thérapeutique. Nous connaissons tous le pouvoir de la musique qui adoucit les mœurs, mais en tant que moyen d’expression, tous les arts possèdent cette faculté thérapeutique sinon de guérir, mais d’apaiser les maux les plus profonds qui torturent l’âme humaine. À plus forte raison, dans les sociétés du monde en développement qui subissent de terribles traumatismes dus à la misère, à la guerre ou aux catastrophes naturelles, la culture et l’art sont indispensables à l’équilibre mental et psychologique de leurs sociétés. La culture désaliène. Elle libère, elle dynamise ;
  • C’est une puissante locomotive économique. Elle représente non seulement l’âme d’une nation, mais elle est aussi marchandise. Quand on lui accorde l’attention qu’elle mérite, elle génère énormément d’argent. En ce sens, elle est un facteur privilégié de développement économique et une arme d’une efficacité redoutable pour lutter contre l’extrême pauvreté. L’économie d’un pays peut recevoir un apport monétaire non négligeable du tourisme, de l’industrie de la musique, de ses œuvres littéraires. Même la façon de sourire d’un peuple, de se comporter, son sens de l’hospitalité, son patrimoine folklorique et historique, sa gastronomie, constituent de sérieux attraits qui peuvent assez facilement en adoptant une politique culturelle adéquate se convertir en espèces sonnantes et trébuchantes et générer des millions d’emplois. Quant à la langue, les recherches en science de l’éducation ont démontré depuis longtemps que la langue maternelle d’un peuple est le meilleur instrument pour son éducation. En Haïti, nous avons le rare avantage que le créole est parlé par toute la population. Ce qui fait du créole un instrument incontournable pour l’éducation pour tous.

Il convient de signaler la nature transversale de la culture, de la langue et de l’art qui leur confère une puissance inouïe en matière de développement social, culturel et économique. La culture et les arts valorisent ceux qui s’y adonnent ou qui évoluent dans un milieu où ils fleurissent. Ils ont un lien direct avec l’éducation, le niveau de vie et le respect des valeurs fondamentales et de l’environnement.

Haïti possède donc tous les atouts en misant sur sa richesse culturelle, linguistique et historique pour vaincre l’extrême pauvreté, faire l’expérience d’un développement durable réussi et atteindre l’objectif que s’est fixé le gouvernement de faire partie des pays émergents à l’horizon 2030.

Haïti est trop riche pour être pauvre, répète toujours le président Martelly. En effet, Haïti est un carrefour de création constante. On retrouve les plus beaux tableaux picturaux dans ses bidonvilles. Au cœur des affres de la misère de ses quartiers précaires, on retrouve les plus grands peintres et sculpteurs, dans les ghettos de Port-au-Prince, d'excellents artisans de récupération brillent de mille feux. Impossible de ne pas mentionner les sculpteurs de la Grand-rue ou ces génies du fer découpé du village de Noailles. Qu’on s’imagine un peu, avec un encadrement adéquat, le rayonnement culturel que ces artistes donneraient à Haïti sur le plan mondial et les retombées économiques que la vente de leurs œuvres engendrerait pour le pays !

La puissance des mots résonne un peu partout à travers le monde pour témoigner de la force de notre littérature et les rythmes de la musique haïtienne font vibrer la majorité des peuples de la planète. N'est-ce donc pas un pays magique bourré de potentialités et de richesses ?

Je suis en train cependant de me livrer à un exercice impossible. Comment traduire en paroles la magie d’une œuvre artistique ? Comment communiquer l’émotion que provoquent un tableau, une musique ? À défaut d’assister à un des ateliers organisés pour les jeunes de Carrefour-feuilles, un quartier précaire à Port-au-Prince, par le groupe rap montréalais Nomadic Massive, il vous faudrait au moins visionner un ensemble de documentaire sur cette expérience. Vous saisiriez alors toute l’énergie positive qui se dégage de ces rencontres, de ces communions, devrais-je dire, où l’on s’exprime, on se libère, on se crée, on se réinvente et on s’affirme, vous comprendriez aussi l’extraordinaire puissance de l’art propre à réaliser des miracles sur le plan social et économique dans une société, dans un pays. Richesse, d’abord en terme de capacité pour l’artiste d’assurer la satisfaction de ses besoins d’ordre matériel, mais aussi et surtout en terme de bonheur ressenti par le simple fait d’exercer une activité qui le passionne, de donner du bonheur à un auditoire qui partage sa passion.

Je ne saurais non plus passer sous silence Kalfou Richès (Carrefour Richesse), programme pensé en vue de sortir de la pauvreté extrême les peintres des quartiers précaires des principales villes du pays qui souffrent dans le dénuement le plus total alors qu’ils débordent de talents. Le projet consiste à les encadrer, à les encourager, à leur donner une formation en technique de peinture et en gestion afin qu’ils puissent s’améliorer et se faire connaître du public. Plusieurs expositions ont été réalisées tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du pays et ils ont été reçus à plusieurs événements d’importance. Déjà, ce ne sont plus des inconnus et des marginalisés. Au-delà des résultats économiques du programme, en deux ans plusieurs d’entre eux ont pu sortir de la pauvreté, la réussite de ce programme réside surtout en l’espoir qu’il a généré au cœur des artistes participants, même ceux qui n’ont pas participé aux programmes. Ils savent désormais qu’ils sont riches de talents, riches d’amour, riches de possibilités. Et cette richesse s’exprime à travers leur langage, leur attitude, leur assurance, leur foi en de meilleurs lendemains pour eux et pour le peuple haïtien tout entier.

Ce projet aura su vraiment dynamiser dans les quartiers précaires le secteur de la peinture ainsi que ceux de tous les arts d’une façon générale.

Je m’en voudrais de ne pas souligner pour vous ce que j’ai surtout retenu du concours de peinture murale pour propager un message de paix, organisé à la suite de la mort de Nelson Mandela et auquel participaient les peintres de 11 quartiers précaires de Port-au-Prince. Ils peignaient bien sûr pour remporter le Prix, mais ce qui les motivait surtout, c’était le désir de projeter une image positive de leur quartier et de leur communauté. Il faut également souligner l’encouragement et le support qu’ils recevaient des membres de leurs quartiers dont plusieurs offraient leur aide et désiraient à un titre ou à un autre apporter leur collaboration. C’est là un exemple entre mille qui prouve que vraiment la culture favorise le dépassement de soi et la cohésion sociale.

Les témoignages les plus touchants que j’ai eus cependant viennent des prisons où mon bureau a fait instaurer des ateliers d’écriture, de peinture et de théâtre aux bénéfices des détenus afin de faciliter leur réinsertion sociale et leur fournir un moyen de subsistance à leur libération. Le projet de réhabilitation sociale dans les centres carcéraux consiste à regrouper des artisans détenus dans un espace multi création en leur fournissant les outils adéquats afin de leur permettre de créer librement. L’idéal c’est de faire des prisons haïtiennes de vrais centres de culture, créateurs de richesses. Le facteur critique de ce projet, ainsi que de tous ceux dont j’ai parlé, tient à l’efficacité de l’encadrement marketing et de l’efficacité des campagnes de communication, qui sont toutes basés sur les traits culturels et linguistiques les plus fondamentaux du peuple Haïtien. La nouvelle campagne pour l’alphabétisation que mon bureau coordonne entre dans le même modèle basé sur une approche participative et le respect des atouts culturels et linguistiques des participants.

Haïti ne saurait se développer sans l’adoption de nouveaux paradigmes, sans d’importants changements au niveau des façons de penser et de faire. Mais ces changements ne pourront se réaliser que dans la mesure où les approches pour y parvenir respectent totalement les valeurs fondamentales de la culture haïtienne. Si j’ai pris le temps de relater ces quelques projets prometteurs, c’est pour vous crier ma foi en la nouvelle approche prônée par l’UNESCO. Grâce à elle, Haïti et le monde en développement sont beaucoup plus près de résoudre le problème de la faim et de la pauvreté dans la mesure où cette option reçoit toute l’attention, l’encadrement et les fonds qu’elle nécessite. Je demeure convaincue qu’avec le climat social qui s’assainit au fur et à mesure, ces projets contribueront grandement à créer les conditions propices à la réalisation du miracle haïtien qui doit hausser le pays au rang des nations émergentes à l’horizon des années 2030.

Conclusion

Il est à déplorer que les bailleurs de fonds et les États se montrent souvent réticents à investir dans des campagnes de communication assurant la promotion de la culture d’Haïti et la promotion de sa langue nationale (le créole). Cette tendance nuit au développement, car on ne saurait aider une communauté à se développer alors que l’on nie sa culture et sa langue. Combien d’organismes internationaux envoient en Haïti des missions composées d’“experts” qui ignorent le B-A-BA de la culture et des langues d’Haïti. A ce chapitre, l’aide internationale devait se réorienter. Beaucoup trop d’organismes qui y œuvrent pensent encore pouvoir imposer leur propre modèle de développement. J’espère par mon intervention avoir démontré que de telles façons de faire sont irrémédiablement vouées à l’échec, car l’homme et la femme ont autant besoin d’art et de poésie que d’oxygène pour vivre et s’épanouir. Le développement est un processus beaucoup trop complexe et ardu pour se passer de la culture et de la langue qui tous deux s’avèrent être des leviers indispensables de développement économique, social et territorial.

Aussi, pour que les progrès enregistrés par l’Administration Martelly et le gouvernement Lamothe se poursuivent et se généralisent jusqu’à faire d’Haïti un pays où la pauvreté extrême est vaincue, certaines approches et mesures devraient être encouragées et supportées :

  • Rendre disponibles les fonds nécessaires pour un investissement massif dans les domaines de la culture et des arts.
    Pour la vulgarisation et la démocratisation de la culture ;
  • créer des dizaines de centres d'intégration communautaire à travers le pays dans un format adapté au milieu géographique pour faciliter les échanges entre les artistes et accroitre les entreprises d’actions collectives. Ces centres d'intégration communautaire seront aussi des lieux de rencontre entre les artistes et chercheurs d’ailleurs et ceux d'Haïti. Ces espaces vitaux permettront aux quartiers précaires de se réunir autour de multiples projets de création de richesse pour la refondation sociale de leur milieu ;
  • Création d'une université d'intégration régionale pour le développement d’une politique culturelle et linguistique de la zone ;
  • Favoriser dans chaque quartier l’émergence d’expressions artistiques originales comme celles des sculpteurs de la Grand Rue ou des artistes du village de Noailles ;
  • Introduire l’expression artistique dans le cursus scolaire et d’alphabétisation pour renforcer la capacité de création ;
  • Utiliser la création artistique pour rendre plus accessibles à la population les conventions et tous les instruments internationaux des droits de la personne ;
  • Renforcer l’aménagement des sites historiques pour intensifier la promotion du tourisme alternatif toujours dans une perspective de création de la richesse ;
  • Transformer toutes les prisons du pays en ateliers de créations de richesse en y instaurant des ateliers de peinture, d’écriture et de lecture. En fournissant aux détenus l’opportunité de recevoir une formation en cordonnerie, en création de mode, de sorte à faire de nos centres carcéraux des lieux de réhabilitation sociale et de création de richesse.

Je vous remercie de votre attention. »


Lire aussi :
https://www.haitilibre.com/article-10691-haiti-social-les-marcheurs-pour-la-paix-sont-arrives-a-port-au-prince.html
https://www.haitilibre.com/article-9401-haiti-culture-deux-siecles-de-solidarite-entre-haiti-et-le-venezuela.html
https://www.haitilibre.com/article-8432-haiti-culture-de-jeunes-artistes-peignent-les-portraits-des-presidents-et-des-chanceliers.html
https://www.haitilibre.com/article-10731-haiti-social-des-artistes-recompenses-dans-le-cadre-d-un-concours-de-fresques-murales.html
https://www.haitilibre.com/article-4457-haiti-culture-deuxieme-edition-de-la-ghetto-biennale.html

HL/ HaïtiLibre

Twitter Facebook Rss
Envoyer l'article à... Nouvelles du Jour...


Réagissez à cet article
Pseudo :
Email :

Votre adresse email ne sera pas divulguée - Commentaire refusé si votre adresse email est fausse


0 caractères saisis. | 1500 caractères restants.
Avant de réagir lisez notre charte de modération


sony
Posté le 06/05/2014 21:20:20
C'est un beau discours Madame la Ministre. Mais ce document serait plus apprécié si vous fournissiez des statitiques relatives aux différents projets cités. N'oubliez pas vous vous adressez a des techniciens qui ne comptent que sur les chiffres. Quels budgets étaient alloués à ces projets? Pendant quelle période de temps? Combien de bénéficiaires ont été touchés par ces activités? Il est temps que nos responsables haitiens apprennent à communiquer des chiffres provenant de leurs activités [hors sujet].Tout ce que la Ministre a mentionné est réel, mais elle n'a pas pu montrer aux étrangers la nouvelle volonté d'agir dans la transparence et convaincre l'étranger de notre volonté d'être responsable [hors sujet]
 




Pourquoi HaïtiLibre ? | Contactez-nous | Charte de modération | Privacy policy | English
Copyright © 2010 - 2024
Haitilibre.com -n